Conseil suisse de la presse

Prises de position de Novembre

No. 64/2019 : Audition en cas de reproches graves / Identification

Un dentiste a déposé plainte auprès du Conseil suisse de la presse suite à un article de Blick du 28 janvier 2019. Blick avait rapporté le cas d'une assistante dentaire en formation. Celle-ci avait évalué les prestations du dentiste sur Google. Elle y avait dépeint son ex-chef comme un dentiste qui traitait mal ses employés et ses patients. Le dentiste était décrit comme étant "très mauvais" et le cabinet "vraiment dangereux » L’apprentie avait alors été condamnée à une amende pour diffamation. Dans son article "Blick" a repris ces accusations.

Dans sa plainte au Conseil suisse de la presse, le dentiste avait affirmé que les déclarations de son ancienne stagiaire nuisaient à sa réputation et étaient diffamatoires. Blick n’a pas fait état du point de vue du dentiste dans son article.

Pour le Conseil suisse de la presse, il est incontestable que la jeune femme a porté de graves accusations. Cependant, comme Blick fonde son article sur un acte judiciaire, il n'avait pas à recueillir le point de vue du dentiste. Étant donné qu'une ordonnance pénale est assimilée à une décision judiciaire en matière d'éthique des médias, il n'est pas nécessaire que toutes les parties concernées soient entendues.

La plainte du dentiste est rejetée.

No. 63/2019 : Recherche déloyale de renseignements / Vie privée / Discrimination

Le 4 janvier 2019, TV Ostschweiz (TVO) a diffusé dans son journal télévisé un reportage sur les élections au Conseil des Etats de St-Gall intitulé Sarah Bösch candidate au Conseil des Etats  Le reportage fait un portrait de Bösch, suivi d’un flash-back où elle est ensuite décrite comme ayant été élue UDC en 2015 durant cinq mois au Parlement de la ville de Wiler. Le reportage fait ensuite état du fait que la candidate avait été, par le passé, arrêtée pour conduite en état d’ébriété et qu’elle s’en était prise à la police sur les réseaux sociaux.

La plaignante estime que la contribution contenait une référence inadmissible à l'"affaire de la bière" et à ses "antécédents policiers". Elle accuse également le radiodiffuseur de discrimination délibérée.

Le Conseil suisse de la presse relève que Sarah Bösch avait été interrogée sur cet incident lors de l'entretien et aurait fait une déclaration à ce sujet. Elle savait donc que ce sujet était susceptible d'être abordé dans le reportage. Il ajoute que le reportage porte sur le passé politique d’une candidate à une haute fonction élective. Le sujet de "l'expérience politique à ce jour" ne peut être complètement laissé de côté. Cependant, les rédacteurs en chef se sont évidemment efforcés de ne pas insister sur ce point en ne faisant qu’une brève allusion au comportement passé de la candidate. En outre, le Conseil suisse de la presse note que l'épisode a influencé de manière décisive la carrière politique de Sarah Bösch et constitue donc une problématique légitime. En outre, l'accusation de discrimination n'est en aucun cas fondée.

Le Conseil suisse de la presse rejette la plainte.

N° 62/2019 : Protection de la vie privée

Le 17 décembre 2018, 20min.ch a lancé un concours "Envoyez-nous une photo de la fête de Noël de votre bureau". Les photos téléchargées par les lecteurs pouvaient alors être visionnées via l'application 20min.ch et ailleurs sur Internet.

X. a déposé une plainte auprès du Conseil suisse de la presse le 18 décembre 2018, alléguant une violation de la vie privée. Il a motivé sa demande en déclarant qu'il n'y avait aucune référence à la protection des données sur la page du concours, de sorte que l'on pouvait supposer que des photos seraient téléchargées et publiées sans le consentement des personnes concernées. Il s'agissait selon lui d’une violation du droit à l'image.

Tamedia a fait remarquer que tout le monde savait que les photos étaient téléchargées sur 20min.ch et qu'elles étaient destinées à la publication. De plus, les lecteurs reporters ont reçu les termes et conditions lors du téléchargement des photos.

L'hypothèse du plaignant selon laquelle "il faut supposer" que le consentement des personnes concernées à la publication de leur photo n'avait pas été donné n'est donc pas correcte. L'éditeur prend en compte la protection des données en transférant la responsabilité de la protection de la personnalité à ceux qui téléchargent les photos.

La plainte est rejetée.

N° 61/2019 : Champ de compétence du Conseil Suisse de presse / Recherche de la vérité / Traitement des sources

Le 11 novembre 2018, le journaliste Fabian Eberhard a posté sur Twitter des vidéos d'une grande manifestation de Varsovie et d'une mer de pyromanes en feu célébrant l'indépendance de la Pologne. Il a écrit en anglais : « Effrayant. 200 000 nationalistes et néo-nazis marchant à Varsovie, en Pologne. »

Quelques jours plus tard, Eberhard a annoncé qu'il devrait fermer temporairement son compte Twitter parce qu'une campagne avait été orchestrée contre lui en raison de sa critique de la droite. Il avait reçu environ 70 000 messages haineux sur Twitter. Ce tweet de Fabian Eberhard a été relayé par les rédactions de CH Media, de Tamedia, SRF et de "Medienwoche" et publié dans leurs éditions en ligne.

Le 29 novembre 2018, X. de Hambourg a déposé une plainte au nom d'une organisation appelée "Polish Media Issues" contre les publications des médias suisses mentionnés ci-dessus relayant le message d’Eberhard. Il y affirme qu'Eberhard prétend avoir été menacé par 70 000 extrémistes de droite polonais, ce qui est, selon lui, totalement invraisemblable, Eberhard n'apportant aucune preuve à cet égard. Le devoir de dire la vérité et le traitement des sources ont été violés. Les médias mentionnés n'ont jamais non plus tenté de vérifier l'affirmation du journaliste du côté polonais. Il soutient que le tweet d'Eberhard sur Internet était une insulte inadmissible aux 200 000 manifestants, qui appartenaient aux groupes et aux courants les plus divers.

En ce qui concerne les tweets du journaliste, le Conseil suisse de la presse n'est pas compétent en vertu de l'article 2 (compétence) de son règlement en vigueur au moment où la plainte a été déposée. Le Conseil suisse de la presse traite des articles de presse, c'est-à-dire des textes publiés à l'issue d'un processus éditorial, mais pas des opinions individuelles exprimées par des particuliers, qu'ils soient journalistes ou non.

Le journaliste Fabian Eberhard est connu des rédactions comme une source fiable et toutes les rédactions ont clairement identifié la présentation des faits (70.000 tweets) sous forme de citations comme l’affirme le journaliste.

En outre, les conclusions individuelles de la plainte sont manifestement inexactes. Aucun des articles critiqués ne parle d'Eberhard "menacé par 70.000 extrémistes de droite polonais", comme le prétend le plaignant. On ne parle que de 70 000 messages haineux en provenance de Pologne, d'Allemagne et des États-Unis. Le requérant prétend en outre que la rédaction n'a fait aucun effort pour vérifier les allégations du journaliste du côté polonais. Cela n'aurait pas été du tout possible en ce qui concerne les tweets, le "côté polonais" n'ayant pas la possibilité de compter les messages sur un compte Twitter fermé.

En outre, ce n'est pas une "insulte aux manifestants" en Pologne que de dénoncer de manière critique le comportement des hooligans et des radicaux de droite, quel que soit leur nombre. Ce n'est pas non plus une insulte à la population suisse que de discuter de manière critique d'événements similaires dans ce pays. Au contraire, il est légitime sur le plan journalistique de dénoncer les tentations antidémocratiques dans un pays qui veut rester démocratique.

La plainte n'est pas traitée. De toute évidence, elle n'est pas fondée.

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